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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

enivrée à l’idée de rester tranquille et de travailler, de travailler ferme, sans relache, en suivant le mouvement… Et puis voilà que de nouveau tout s’efface ! Et pendant que d’autres iront toujours en avant au milieu de ce Paris artistique, moi je serai là-bas à ne rien faire ou à courir après un tableau en plein air qui est une chose horriblement difficile… Voyez Breslau, ce n’est pas sa paysanne qui lui a valu quelque chose… En un mot, mon ceur se fend et se brise devant tout cela. Ce soir, j’ai vu Charcot qui dit que le mal, depuis l’année dernière, n’a pas empiré ; quant à ce que j’ai depuis six jours, c’est un refroidissement sans gravité et qui partira très vite. Quant au Midi, c’est la même chose : il faut y aller ou bien s’enfermer absolument comme une prisonnière. Sans quoi on court risque d’attraper des choses graves ; vu que le poumon droit est pris et encore, paraît-il, j’ai de la chance : c’est un mal curable qui s’est localisé et qui n’augmente pas, malgré toutes mes prétendues imprudences. Ils m’ont dit la même chose, l’hiver dernier, et je n’ai seulement pas voulu écouter ; maintenant, j’hésite et restedes quatre heures à pleurer, comme hier, à cette idée de quitter encore Paris, de m’interrompre… Il est vrai que si je suis souvent comme ces derniers jours, Paris ne me profitera guère… Et voilà ce qui me désespère ! Me rendre, m’avouer vaincue, dire : Oui, ils ont raison les médecins. Oui ! je suis malade. Ah ! non, tout va mal décidément. Samedi 26 novemóre. – Je devais aller chez Tony, vous vous rappelez, pour travailler sous ses yeux et pour lui montrer mon esquisse et décider quelque chose,