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JOURNAL

vous cacherai pas que j’ai horreur des gens ternes, et tant pis pour ceux qui ne voient que le côté comique de ces natures exceptionnelles, cabotines, poseuses et charmantes ; vous m’opposerez des talents supérieurs qui restent modestes et tranquilles, ah ! tant pis pour. eux et pour nous !

Lorsque le ciel vous gratifie de tous ses dons, vous étes un être incomplet, si vous restez dans votre coin, au lieu de profiter de votre valeur réelle pour faire un peu de cabolinage, comme disent les imbéciles vulgaires. Vendredi

26 mai. — Les récompenses accordées sont révoltantes ; celle de Zilhardt est une des mieux justifiées. -— Mais il y en a d’autres, c’est écceurant et cela vous remplit de tristesse ! Il semblerait que les artistes devraient être plus consciencieux et plus honnêtes que les autres hommes. Eh bien ! pas du tout, et j’en suis attristée. Dimanche 28 mai. — La duchesse de Fitz-James est venue dire qu’elle nous présenterait le soir chez sa belle-fille. Il

y avait bal. Maman assure que cette dame est tout ce qu’il y a de plus aimable. Elles se voient assez souvent, mais je ne sais rien au juste. Donc, nous allons la prendre et arrivons ensemble. C’est tout ce qu’il y a de plus chic : du vrai monde, de vraies jeunes filles, ravissantes et fratches. De vraies toilettes. La vieille duchesse a je ne sais combien de neveux et de petits-enfants. Les noms que j’ai entendu prononcer sont les plus connus et les plus aristocratiques, et le peu de personnes que je connais sont ce qu’il y a de plus élégant. Quant à moi, tout enchantée de me trouver dans ce salon, je pensais tout le