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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

Dimanche 30 juillet. Robert-Fleury

est venu le soir et nous avons eu une conférence à proLundi 31. pos

du tableau… et en général à propos du travail. Je ne travaille pas comme il faut. Depuis deux ans, je n’ai

de suite dans les idées, et puis il ne m’arrive pas

jamais de pousser une étude jusqu’au bout. C’est vrai, ça… Il me le dit pour me prouver que je fais autant de progrès que possible vu la façon dont je travaille, et que les jeunes gens travaillent plus et mieux. Rien ne fait comme la ténacité, la suite, tandis qu’une bonne semaine et puis rien, ne représentent pas grand’chose, ne font pas avancer. Mais c’est vrai, j’étais malade, en voyage, sans atelier… A présent tout va bien et si je ne m’y mets pas, c’est que je ne vaux rien. Le tableau est bien, je le ferai bien. La peinture de cette semaine est grasse, mais… je vous dis que pour sortir de mon désespoir, il faudrait qu’il me dit quelque chose de plus monté, enfin que je suis aussi forte que… quelqu’un de très fort ; que je puis faire ce que veux, que… Et il me dit, quand je me plains, que c’est. de la folie et qu’il n’a jamais vu personne faire plus en si peu de temps. Quatre ans !  !  ! alors il dit que les plus doués, les plus heureux ne parviennent qu’au bout de sept, huit et dix ans. Ahl c’est atroce. Il y a des moments où on se casserait la tête. La rhétorique ne sert à rien. Il faut produire quelque chose qui les fasse sauter d’étonnement, rien d’autre ne me rendra la paix… Lundi 7 août.

La rue ! En revenant de chez Robert-Fleury, nous avons fait passer par les avenues qui entourent l’Arc de Triomphe, c’est vers’six heures et demie, l’été ; les concierges, les enfants, les garçons en courses, les ouvriers, les femmes tout cela aux portes