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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

On a sifflé Sarah Bernhardt à son arrivée à la gare de Pétersbourg, parce qu’on s’attendait à la voir grande, brune, avec des yeux noirs énormes et une masse de cheveux noirs ébouriffés. A part celte stupidité, le jugement porté sur le talent et la femme a été très sain, et je suis tout à fait de l’avis des journaux russes qui mettent au-dessus de Sarah Mle Delaporte. Et Desclée donc ? Moi, Sarah ne me dit pas grand’chose, sauf l’adorable musique de sa voix, lorsqu’elle dit des vers. Mais qu’est-ce que je viens vous parler de Sarah ? Vendredi 20 octobre.— Lundi 23 octobre. Consternation générale, samedi matin. Les princes s’excusent ! Ils ne viendront pas chasser, appelés par une dépêche dans une propriété à côté. Et moi qui avais tant de peine à m’habiller ! car il faut vous dire qu’ayant bu du mauvais lait, j’avais tellement mal au ceur que ce n’est que par un grand effort que je suis arrivée à mettre cette rohe noire, en velours, avec laquelle il est impossible d’ètre laide. Papa en était vert et maman rouge.

Moi, je riais et de bon ceur. Enfin on est parti, par dépit, la mort dans l’âme et jurant de n’aller que jusqu’à chez Michel, où on devait laisser souffler les chevaux et qui attendait avec un déjeuner magnifique. Puis, les esprits un peu calmés, on a continué le chemin, tout en se querellant chaque cinq minutes, pour revenir en arrière. On arrêtait en pleins champs ; papa, Paul et Michka descendaient, et les discussions s’engageaient par la portière. A Michka on donnait comme prétexte le malaise de maman. Enfin papa ayant dit à notre cocher de ne plus nous écouter, on est reparti, moitié riant et moitié désolé, Il est évídent que personne ne peut se douter de nos M. B. —— I.

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