Page:Bashkirtseff - Journal, 1890, tome 2.pdf/553

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
548
JOURNAL

Eh bien, Bastien-Lepage, je l’ai aimé comme j’aime Zola que je n’ai jamais vu, qui a quarante-quatre ans, une femme et du ventre. Je vous demande si les hommes du monde, ces hommes qu’on épouse ne sont pas atrocement ridicules ? Qu’est-ce que je pourrais bien dire à un gentleman pareil toute la journée ? Emile Bastien dine ici, et m’annonce pour jeudi matin sa visite avec M. Hayem, un amateur assez connu.

Il a des Delacroix, des Corot, des Bastien-Lepage et il a la spécialité de découvrir les futurs grands peintres. Le

lendemain du jour où le portrait du grand-père Bastien-Lepage fut exposé, Hayem arrivait dans son atelier et lui commandait le portrait de son père à lui. Il paraît qu’il a un flair étonnant. Émile Bastien l’a rcncontré aujourd’hui devant mon tableau. Comment trouvez-vous ça ? Je trouve ça très bien, connaissez-vous l’artiste ? Est-il jeune ? etc., etc. Ce Hayem m’a suivie depuis l’année dernière où il a remarqué le pastel et cette année le tableau… Bref, ils viendront jeudi. Il désire m’acheter quelque chose.

Lundi 12 mai —Après des journées glaciales, nous avons 28 et 29 degrés depuis trois jours. C’est accablant. Je termine une étude de petite fille, au jardin, dans l’espoir de la visite de l’amateur. J’ai oublié de dire que nous avons rencontré Hecht dans l’escaliér des Italiens, il est dans l’enthousiasme de mon tableau.

C’est égal, ce n’est pas encore ca. Mais lorsque BastienLepage a exposé le portrait du grand— père ce