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journal de ma vie.

m’estant mis en colere contre Plaisance de l’estat ou j’avois trouvé sa garde, des habitans qu’il souffroit sur le rempart apres la garde posée, et de ne m’avoir envoyé dire que Mr  le cardinal de Guyse fut a la porte, et qu’il l’eut laissé entrer, et ouvrir la porte, sy je n’y eusse venu, je le menaçay de luy faire desplaisir, et luy s’excusa assés mal. Je fis monter les soldats de la garde quy estoit devant mon logis, sur le rempart, et fis dire par le sieur des Estans que ceux quy estoint sur le pont eussent a se retirer, ou que l’on tireroit sus eux. Monsieur le cardinal allors dit : « Je vous prie que l’on face dire a Mr  de Bassompierre que c’est le cardinal de Guyse quy est a la porte. » J’estois derriere Des Estans quy luy respondit par mon ordre : « Mr  de Bassompierre est couché ; on ne parle point a luy : retirés vous, et promptement. » Il ne se le fit pas dire deux fois et deslogea.

La compagnie de Plaisance n’estoit pas lors de plus de quinse hommes parce que son fils avoit emmené le reste a Mets pour Mr  de la Vallette : je laissay vingt soldats quy faisoint garde devant mon logis avesques le capitaine du Pont[1] pour les commander, lequel estoit plus ancien que Plaisance, et fis semblant de vouloir renforcer la garde de la porte pour luy en oster la puissance et en estre asseuré. Tous ces messieurs qui m’estoint venus voir arriverent en file a moy, de sorte que j’avois plus de soissante hommes a ma suitte pour aller ou le besoin seroit. Je m’en revins

  1. Jean du Pont, gentilhomme du Vivarais, capitaine au régiment de Champagne, s’était déjà signalé à la guerre.