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1616. aout.

depuis l’entreprise de Mr de Longueville, le partement du mareschal d’Ancres et la toute puissance de Mr le Prince dans les affaires et conseils ; finalement qu’il ne la tenoit pas asseurée dans Paris et qu’elle seroit mieux avec mille chevaux a la campaigne avec ses enfans, que dans le Louvre, en l’estat ou estoint les esprits des grans et du peuple ; qu’il avoit creu estre de son devoir et des obligations qu’il avoit au feu roy de luy remontrer ce que dessus, ne pouvant y apporter avec sa vie un autre remede, qu’il employeroit volontiers sy par sa perte il pouvoit sauver le roy, elle, et l’estat : et en suitte il prit congé d’elle, luy suppliant de penser a ce qu’il luy venoit de dire, et qu’en cas qu’elle n’y apportat le remede convenable, il protestoit de tout le mal quy luy en adviendroit, et qu’a elle seule en seroit la faute puisqu’elle en avoit esté avertie et que le mal estoit preveu.

A ce discours la reine respondit que forces gens l’advertissoint du mal, mais que peu luy donnoint l’avis du remede et moins encores aydoint a l’assoupir ; qu’elle faisoit humainement tout ce quy se pouvoit pour le bien de l’estat, mais qu’il ne plaisoit pas a Dieu de benir son travail, ny aux hommes de reconnestre ses bonnes et saintes intentions ny d’y concourir ; qu’a ce sujet elle avoit donné la plume a Mr le Prince, a ce sujet desarmé le roy, a ce mesme sujet despouillé le mareschal d’Ancres de l’establissement qu’il avoit en Picardie, et en suitte voyant qu’il n’estoit pas agreable aux grans elle l’avoit eslongné ; qu’elle faisoit des grans biens a un chascun et mal a personne, et qu’elle ne sçavoit plus que faire autre chose que ce qu’elle avoit fait ; qu’il avisat luy mesme a luy donner quelque