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1622. mai.

ner dans le bastion, dans lequel ils disoint avoir reconnu qu’il n’y avoit pas dix hommes pour le deffendre, et que nous le prendrions infailliblement, sans nous donner la peine d’aller coulant le long du bastion ou nous ne pourrions estre de trois heures, et le persuaderent de telle sorte a Mr de Pralain, qu’il m’envoya querir en nostre travail ou j’estois, pour me commander de faire l’ordre pour donner. Mrs de Vandosme et grand prieur de France avec plusieurs autres jeunes seigneurs, y estoint, quy animoint monsieur le mareschal a faire faire cette attaque. Je fus bien estonné quand je le vis resolu a ce dessein, et luy dis : « Monsieur, s’il vous plait que sans replique j’aille executer ce que vous me commandés, je ne laisseray de vous dire ce seul mot pour ma descharge, que vous faites une chose prejudiciable au service du roy et de laquelle vous aurés, mais trop tard, un eternel repentir. Mais sy, comme vous avés entendu les raysons de mes aydes de camp et des autres quy vous ont persuadé de faire cette attaque, vous voulés aussy entendre les miennes, je m’asseure que non seulement vous quitterés ce dessein, mais que vous me remercierés devant qu’il soit nuit de vous avoir persuadé de desister cette pratique. » Il me dit lors : « Et bien, dittes donc ; ce n’est pas d’astheure que nous nous connoissons et que je sçay que vous vous plaisés a contrarier les propositions d’autruy pour faire voir vostre bel esprit : qu’avés vous a remontrer contre ce que tous les autres unanimement approuvent et proposent ? » Je luy dis lors :

« Monsieur, sy nous n’avions aucun autre moyen de prendre ce bastion que l’on attaque maintenant, [que