Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 10, 1922.djvu/260

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Monstre que tu es… qui essayes par ton silence de me faire croire à cette absurdité !… Ah ! tu t’y entends à me torturer !… La voilà, ta riposte !… Comme si c’était vraisemblable… ma fille !… C’est trop bête !… Vas-tu parler à la fin… vas-tu te justifier !… Non, tu ne sortiras pas avant d’avoir dit la vérité… Ne reste pas ainsi dans cette attitude de défi ou, je ne sais pas, moi, d’aveu !… Ce n’est pas vrai !… Tu mens !…

GENEVIÈVE.

Je n’ai rien dit !…

DARTÈS.

Oui, mais tu mens tout de même !…

FRÉDÉRIC.

Geneviève, parle !… délivre-le d’un doute qui le fait justement souffrir… et qui t’offense, toi, j’en suis certain ! Ne supporte pas plus longtemps cette accusation !…

GENEVIÈVE.

À quoi bon !… Il n’y a plus entre lui et moi ni mensonge ni vérité !… Nous sommes parvenus à un point où, seule, la séparation, et la séparation définitive peut apporter un soulagement à cet état de guerre… que les paroles, les aveux ou démentis ne feraient qu’envenimer !… Qu’il croie ce que bon lui semble ; je ne répondrai pas !… Tirons de tout ceci une moralité… qu’il est urgent dès aujourd’hui de mettre de l’espace entre nous !… C’est la scission nette, l’heure en est arrivée !… Nous n’avons plus rien de commun !… tu entends ? plus rien !…

(Elle a laissé tomber ce dernier mot comme un couperet. Elle va prendre sa fourrure sur un fauteuil.)