Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 11, 1922.djvu/304

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la vérité !… Assez de cette vie qui n’est plus de son âge ni de son rang !…

LEGARDIER.

Oui, Barnac ! Pas de souillure à la pensée ! Il y a des raisons plus hautes d’exister. Songe à ton renom et à ton œuvre !

BARNAC, (se redressant, en frappant sur la table.)

Soyez sans crainte. Mes amis, ne craignez rien, vous allez me connaître !…

MARTHE.

Ah ! tu es bien gardé, maintenant !… Je le prévois, ils te feront, contre moi, un rempart de leur grandeur d’âme !… Eh bien, puisque tu veux que je m’en aille… si tu crois que cette séparation t’apportera le bonheur… pour toi, mais pour toi simplement, je m’en irai sans lutter, mon pauvre grand !… Car si je voulais, si je voulais tout de même… peut-être que, malgré eux… (Elle fait un mouvement en avant, vite réprimé.) Mais je n’en ferai rien, va !…

GENIUS, (derrière Barnac, suppliant à voix basse.)

Barnac, ne l’écoute pas, je t’en conjure !…

MARTHE, (en larmes.)

Oh !… n’ayez pas peur, allez !… J’ai dit que je le laisserais, et je le laisserai !… Mais j’ai mon cœur si gros, si gros !… Adieu, mon chéri, adieu… (Barnac, immobile, appuyé sur la table, ne se retourne pas.) Dis-moi adieu, toi aussi, puisqu’on ne se reverra plus… Qu’est-ce que ça te ferait de me dire adieu ?… Pourquoi détournes-tu les yeux, ces yeux qui m’ont tant aimée ? Regarde-moi d’un bon regard qui pardonne… un regard qui