Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 6, 1922.djvu/137

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d’en sortir ! Et si tu m’aimais, toi, si peu que ce soit, crois-tu que, depuis que je suis ici, tu ne m’aurais pas couverte d’injures ou serrée dans tes bras !…

ARMAURY.

Fanny, ce n’est pas le désir qui m’en fait défaut !… mais je m’efforce au calme de toute l’énergie que tu me connais, je redoute l’éclat de nos sensibilités… Sans quoi…

(Il a un mouvement vers elle. Fanny, le voyant, se lève, avec un mouvement de pudeur froissée.)
FANNY.

Oh ! je n’ai pas réclamé !… Je t’en prie… Toi aussi tu me connais, j’ai horreur des pleurnicheries, et je n’attache pas, mon Dieu, un tel prix à ma propre personne. Je ne serai pas comme tant d’autres, va… je n’irai pas crier sur les toits mon chagrin ni tes lâchetés : je tâcherai de me faire un veuvage très digne.

ARMAURY.

Ah ! Fanny ! l’être d’élite et de distinction que tu es méritait mieux que ce que je t’ai donné ; tu valais tous les bonheurs… Fanny, je suis voué au silence devant toi et sois sûre que, si je ne tenais pas justement à éviter une explication profonde, une explication qui ne nous mènerait à rien de bon, sois sûre que je trouverais d’autres paroles et une autre attitude que celles auxquelles je m’efforce, auxquelles je m’accroche… comme à une consigne !

FANNY.

Mais je les devine, tes paroles, va ! je les devine toutes ! Ne te donne pas la peine. Excuses, fatalité, pas d’enfant, obligation de me quitter, etc.,