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LETTRES — 1864 357

Dans votre analyse si correcte d'Eurêka, vous avez fait ce qu’à votre âge je n’aurais peut-être pas pu faire, et ce qu’une foule d’hommes très mûrs et se disant lettrés sont incapables de faire. Enfin, vous m’avez prouvé ce que j’aurais volontiers jugé impossible, c’est qu’une jeune fille peut trouver dans les livres des amusements sérieux, tout à fait différents de ceux, si bêtes et si vulgaires, qui remplissent la vie de toutes les femmes.

Si je ne craignais pas encore de vous offenser en médisant de votre sexe, je vous dirais que vous m’avez contraint à douter moi-même des vilaines opinions que je me suis forgées à l’égard des femmes en général.

Ne vous scandalisez pas de ces compliments si bizarrement mêlés de malhonnêtetés; je suis arrivé à un âge où l’on ne sait plus se corriger, même pour la meilleure et la plus charmante personne.

Croyez, Mademoiselle, que je garderai toujours le souvenir du plaisir que vous m’avez donné.

A POULET-MALASSIS •

Mon cher ami,

Pincebourde me dit que vous partez pour Bruxelles, aujourd’hui 15. Est-ce vrai? Quand vous partirez,je vous chargerai d’une note pour M. Vervoort, résident de la Chambre des députés et président du Cercle artistique, contenant les titres des lectures que je veux faire. Je veux un traité: 200 fr.