Page:Baudelaire - Lettres 1841-1866.djvu/47

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’ose pas vous faire de compliments. Cela est si banal, — mais vos yeux, votre bouche, toute votre personne, vivante et animée, passe, maintenant, devant mes yeux fermés, — et je sens bien que c’est définitif.

Revenez, je vous le demande à genoux ; je ne vous dis pas que vous me trouverez sans amour ; mais cependant vous ne pourrez empêcher mon esprit d’errer autour de vos bras, de vos si belles mains, de vos yeux où toute votre vie réside, de toute votre adorable personne charnelle ; non, je sais que vous ne le pourrez pas ; mais soyez tranquille, vous êtes pour moi un objet de culte, et il m’est impossible de vous souiller ; je vous verrai toujours aussi radieuse qu’avant. Toute votre personne est si bonne, si belle, et si douce à respirer ! Vous êtes pour moi la vie et le mouvement, non pas précisément autant à cause de la rapidité de vos gestes et du côté violent de votre nature, qu’à cause de vos yeux, qui ne peuvent inspirer au poète qu’un amour immortel. Comment vous exprimer à quel point je les aime, vos yeux, et combien j’apprécie votre beauté ? Elle contient deux grâces contradictoires, et qui, chez vous, ne se contredisent pas, c’est la grâce de l’enfant et celle de la femme. Oh ! croyez-moi, je vous le dis du fond du cœur : vous êtes une adorable créature, et je vous aime bien profondément. C’est un sentiment vertueux qui me lie à jamais à vous. En dépit de votre volonté, vous serez désormais mon talisman et ma force. Je vous aime, Marie, c’est