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LES LORTIE

Et comme la physionomie de Ninette exprimait clairement le désir qu’elle avait de savoir, Cunégonde poursuivit :

— C’est ben simple, je viens de recevoir une lettre de Jules.

— Une lettre de votre Jules ?

Mon Jules ! Dites pas ça, malheureuse ! C’est pas et ça sera jamais mon Jules !

— Mais qu’est-ce qu’il vous a fait ?

— Après tous les services que je lui ai rendus ! Ah ! bout de peanut ! Me faire ça à moi. J’aurais dû m’en douter que c’était pas pour rien qu’il me faisait une si belle façon. J’aurais bien dû penser qu’à mon âge, c’était pas naturel qu’un gars de même soye en amour avec moi !

— Mais encore une fois, Cunégonde, qu’est-ce qu’il vous a fait ?

— Comment, je vous l’ai pas encore dit ? Tenez, regardez ! Regardez la lettre que j’ai reçue à matin ! Si c’est pas épouvantable !

De la poche de son manteau, elle sortit une feuille de papier sur laquelle Ninette put lire :

Je vous écris pour vous faire savoir que tout est fini entre nous deux. Vous m’avez trompé, j’aurais bien aimé à continuer à vous voir, j’aurais bien aimé finir par me marier avec vous, mais vous m’avez trompé, et moi je pourrais pas vivre avec une femme qui m’a trompé. Oui, vous m’avez trompé car c’était bien me tromper que de me faire accroire que vous aviez quinze mille piastres à la banque. Ça je l’ai sur le cœur et jamais je ne pourrai l’oublier. Oui je l’ai sur le cœur, parce que je le sais à présent, vous n’avez rien que $3, 500.00 à la banque. Comme j’avais l’honneur et le chagrin de vous le dire au commencement de ma lettre, après une chose pareille tout est fini. Croyez