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LES LORTIE

— Et voilà, Votre Seigneurie, un témoin digne de foi, commerçant respectablement connu, qui vient de jurer sur l’Évangile, qu’il reconnaissait en l’accusé le bandit qui l’a lâchement dévalisé. Mon savant confrère de la défense a peut-être raison lorsqu’il me conteste le droit de chercher à prouver un crime dont l’inculpé n’est pas accusé. Je n’ai d’ailleurs pas l’intention de m’occuper, avant la fin du présent procès tout au moins, de l’accusation de vol à main armée. Cependant, Votre Honneur, j’ai prouvé — et cela me parait amplement suffisant — que Marcel Lortie, quoiqu’il en ait dit, quoiqu’il en ait juré, avait déjà eu en sa possession un revolver avant le soir de son arrestation. Tout-à-l’heure, Votre Seigneurie, la défense va certainement faire témoigner la sœur de l’accusé et lui faire dire que…

Martin se leva d’un bond.

— Je m’objecte, Votre Seigneurie ! s’écria-t-il. Je voudrais bien savoir comment mon adversaire s’y prend pour faire des prédictions sur les agissements de la défense ? Je trouve par surcroît absolument déloyal de chercher à jeter le discrédit sur la déposition d’un témoin, avant même que ce témoin ait été appelé à déposer !

— Objection maintenue, dit le juge en jetant, pour la centième fois peut-être, les yeux sur sa montre.

Falardeau haussa les épaules.

— C’est bien, dit-il en se rasseyant. Dans ce cas-là, Votre Seigneurie, la Couronne a terminé sa preuve.

Falardeau se contentait donc d’un seul témoin. Sa Seigneurie se reprit à espérer que, peut-être, on pourrait bâcler l’affaire avant la fin de la journée, et donna la parole à maître Léon Martin.