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chevêque François de Rohan, qui se réserva le droit d’approuver le choix du recteur. Le consulat donna tous ses soins au collège naissant, agrandit les locaux, institua quatre classes, établit une rétribution scolaire (2 sols 4 deniers) et appela des professeurs dont quelques-uns avaient déjà ou eurent bientôt de la renommée[1].

Les premiers supérieurs furent Guillaume Durand, Jehan Canappe (le même qui enseigna la chirurgie en français), Loys du Vergier, très favorable à la Réforme, puis Jean Raynier (Raynerius, Raenerius) Celui-ci fut regardé par les premiers humanistes et poètes latins de Lyon comme leur maître, à qui ils adressaient de nombreuses épigrammes laudatives et de qui ils sollicitaient les compliments.

Le plus célèbre des recteurs du Collège de la Trinité fut sans aucun doute Barthélémy Aneau[2] (Anulus) né à Bourges au commencement du siècle, appelé par le consulat comme professeur de rhétorique en 1529, principal une première fois en 1540 et définitivement en 1553. — Aneau est le représentant le plus caractéristique du côté pédant de la Renaissance lyonnaise. Ayant fait des études solides (sous l’helléniste Wolmar, l’ami de Mélanchthon), à l’Université de Bourges, avec Amyot, Bèze et Calvin, il disposait d’une instruction extraordinaire qui lui valut l’estime de beaucoup d’humanistes. Bien qu’il eût toujours professé une sorte d’indifférence correcte matière religieuse, il était protestant convaincu et mourut en martyr de sa confession[3]. Ami intime et admirateur de Marot, dont il continua la traduction des Métamorphoses[4], et de Rabelais, il aspirait à une littérature purement nationale ; il combattit les corruptions italiques surtout en moraliste sévère et en protestant, instruit peut-être par des expériences Y faites dans la société lyonnais e. Dans le Quintil Horatian[5] (ouvrage original mais pédantesque qui n’exprime aucunement les idées du milieu littéraire de Lyon, quoiqu’on en ait dit, mais seulement celles d’Aneau), il déclara la guerre aux principes exposés par

  1. Buisson, Castellion, t. I. p. 18.
  2. Article de la France protestante. — Montfalcon. Hist. mon, t. II p. 49-52. — Buisson, Castellion. t. I, p. 22. — Mugnier, M Cl de Buttet. Annales de Savoie XXXV. p. 9a ff. Malheureusement il n’existe pas encore de travail spécial sur B. Aneau.
  3. Le 5 juin 1561, il fut massacré dans une émeute de la populace catholique. — Une clause de son contrat prouve qu’il était suspect d’hérésie : Il lui est enjoint estre leu ni enseigné audict collège aulcune doctrine, ni livre deffendus ou censurez, contre l’honneur, auctorité et deffense de nostre mère Saint Eglise et souffrir audict collège estre tenu propos, ni dogtnatisartt ni enseignant en mauvaise doctrine en particulier, ni en général.
  4. Lyon, Guillaume Roville 1549.
  5. Revue d’hist. litt. de la France, 15 janvier 1898. — Chamard. Joachim du Bellay, Lille 1900. — Joachim de Bellay, œuvres complèts, p. p. Léon Séché, t. I. Paris 1903. p. 61 ff.