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DATI.

tail de chenevière, et de terreur publique aux méchans ; mais il soutient que ce portrait n’a jamais été vu que chez les libraires du palais, qu’on le voit briller encore au front de tous ses ouvrages, et que les peintres les plus curieux le recherchent aujourd’hui comme un original digne de leurs copies [1]. Je ne crois pas qu’ils le fassent pour avoir à peindre un beau visage ; car celui de d’Assouci n’est rien moins que tel. Je n’ai pas trouvé dans la relation de MM. de Bachaumont et la Chapelle, qu’on le fasse le Thersite de notre siècle [2]. Il se plaint de cela [3], et oppose à cette injure les vers que l’on fit sur son portrait :

On vous avertit que voici
Le portrait du grand d’Assouci,
Cette merveille de nostre âge.
Contemplez-le donc bien ; et si
A peu près aux traits du visage
Vous croyez qu’un tel personnage
Ne peut qu’avoir bien réussi,
Achetez vite son ouvrage,
Et vous verrez qu’il est ainsi.
Chapelle.


  1. D’Assouci, au tom. II, pag. 21 de ses Aventures.
  2. Là même, pag. 259.
  3. Là même, pag. 257.

DATI (Carlo) [* 1], professeur en humanités à Florence, sa patrie, est devenu fort célèbre, tant par ses ouvrages, que par les éloges qu’une infinité d’écrivains lui ont donnés (A). Il était fort honnête et fort officieux envers tous les doctes voyageurs qui passaient par la ville de Florence : plusieurs d’entre eux lui ont témoigné leur gratitude dans leurs écrits [a]. Il était membre de l’académie della Crusca, et se donnait en cette qualité-là le nom de Smarrito. Il fit en italien un panégyrique de Louis XIV, et le publia à Florence l’an 1669 [b]. La version française qu’un autre en fit fut imprimée à Rome l’année suivante. Il avait déjà publié quelques poésies italiennes à la louange du même prince [c]. Vous connaîtrez par-là en quel temps il a fleuri.

  1. * Sur ce personnage, Joly se contente de renvoyer au tome XXIV des Mémoires de Niceron, et de rapporter un passage des Mélanges de Chapelain (page 46), relatif à C. Dati.
  1. Voyez l’Italia regnante de M. Leti, part. III, pag. 369 et suiv. Louis nous renvoie à la page 170 de cet ouvrage de M. Leti. C’est faire deux fautes, ne marquer pas le volume, et marquer mal la page.
  2. Leti, Italia regnante, parte III, pag. 367.
  3. Ibid., pag. 363, 367.

(A) Il est devenu fort célèbre, tant par ses ouvrages que par les éloges qu’une infinité d’écrivains lui ont donnés. ] On trouvera dans le troisième volume de l’Italia regnante de M. Leti tout le commentaire que ce texte peut demander : je n’en copierai qu’une petite partie. M. Leti [1] remarque que le livre intitulé Lettera di Timauro Antiate à Filaleti, della vera storia della cicloide, e della famosissima esperienza dell’ argento vivo, est une composition de Carlo Dati : il nous renvoie à la page 149 du Traité de Placcius de Scriptis et scriptoribus anonymis atque pseudonymis. Ce renvoi est bon ; car on trouve dans la page indiquée que le prétendu Timauro Antiate est Carlo Dati, et que cela paraît manifestement par la page 26 de la lettre. On y trouve aussi que cet écrit fut imprimé à Florence l’an 1663, et que l’auteur prouve deux choses : l’une que Marin Mersenne n’est point l’inventeur de la ligne cycloïde, comme on l’a débité dans l’Histoire de la roulette ; mais que la gloire de cette invention appartient à Galilée : l’autre, que Torricelli est innocent du plagiat qu’on lui impute, à l’égard de l’hypothèse qui explique par la pression de l’air la suspension de l’argent vif. C’est lui qui a été le premier auteur de cette hypothèse, si l’on en croit Carlo Dati. Il y a beaucoup d’apparence que Monconys confond les choses quand il dit : Le sieur Carlo Dati me donna sa lettre imprimée pour prouver que Torricelli avait trouvé le

  1. Leti, Italia regnante, tom. III, pag. 363, 364.