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DAVID.

trouvait embarrassé, il les quitta, et résolut de ne se servir que de sa fronde Il le fit si heureusement qu’il terrassa d’un coup de pierre ce rodomont [a], et puis il le tua de sa propre épée, et lui coupa la tête qu’il vint présenter à Saül (C). Ce prince avait demandé à son général, en voyant marcher David contre Goliath : de qui est fils ce jeune garçon [b] (D) ? Le géneral lui répondit qu’il n’en savait rien, et reçut ordre de Saül de s’en informer : mais Saül l’apprit lui-même de la bouche de ce jeune homme ; car, lorsqu’on le lui eut amené après la victoire, il lui demanda : de qui es-tu fils ? et David lui répondit qu’il était fils d’Isaï [c]. Alors Saül le retint à son service, sans lui plus permettre de s’en retourner chez Isaï [d]. Mais comme les chansons qu’on chanta par toutes les villes, sur la défaite des Philistins, faisaient dix fois plus d’honneur à David qu’à Saül [e], le roi sentit une jalousie véhémente qui s’augmenta de plus en plus, parce que les emplois qu’il donnait à David, afin de l’éloigner de la cour, ne servaient qu’à le rendre plus illustre, et à lui acquérir l’affection et l’admiration des Juifs. Par une fausse politique il voulut l’avoir pour gendre : il espéra que la condition sous laquelle il lui donnerait sa seconde fille le délivrerait de cet objet d’aversion ; mais il fut confondu dans sa ruse. Il demanda pour le douaire de sa fille cent prépuces de Philistins : David lui en apporta deux cents bien comptés [f] ; de sorte qu’au lieu de périr dans cette entreprise, comme Saül l’avait espéré, il en revint avec un nouvel éclat de gloire. Il épousa la fille de Saül, et n’en devint que plus formidable au roi [g] : toutes ses expéditions furent très-heureuses contre les Philistins ; son nom fit grand bruit ; il fut dans une estime extraordinaire [h] ; si bien que Saül, qui connaissait beaucoup moins la vertu de son beau-fils que le naturel des peuples, s’imagina que la mort de David était la seule chose qui fût capable d’empêcher que l’on ne le détrônât. Il résolut donc de s’en défaire pour une bonne fois. Il fit confidence de ce dessein à son fils aîné qui, bien loin d’entrer dans la jalousie de son père, avertit David de ce noir complot [i]. David prit la fuite, et fut poursuivi de lieu en lieu, jusqu’à ce qu’il eût donné des preuves incontestables de sa probité, et de sa fidélité à son beau-père, à qui il ne fit aucun mal en deux occasions favorables [j], où il ne tenait qu’à lui de le tuer. Cela fit résoudre Saül à le laisser en repos. Mais comme David craignit le retour des mauvais desseins de ce prince, il n’eut garde de relâcher ses précautions ; au contraire, il se

  1. Là même, vers. 49, 50.
  2. Là même, vers. 55.
  3. Là-même, vers. 58.
  4. Là même, chap. XVIII, vers. 2.
  5. Les femmes allant au-devant du roi dansaient, et chantaient, Saül en a tué ses mille, et David ses dix mille. Ier. livre de Samuel, chap. XVIII, vers. 7.
  6. Là même, vers. 27.
  7. Là même, vers. 29.
  8. Là même, vers. 30.
  9. Là même, chap. XIX, vers. 1 et 2.
  10. Là même, chap. XXIV et chap. XXVI.