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MARULLE.

re Gesner rapporte le titre de cet ouvrage de Marule : De religiosè vivendi institutione lib. 6. per exempla ex veteri novoque Testamento collecta, ex authoribus quoque D. Hieronymo Presbytero, Gregorio Pont. Mar. Eusebio Cæsariensi, Jo. Cassiano nonnullisque aliis qui vitas conscripsêre sanctorum digesta per capita sive locos communes 70 [1]. Le Mire a trop abrégé cela ; il s’est contenté de dire : Scripsit libros sex exemplorum, hoc est dictorum factorumque memorabilium [2] ; et néanmoins Moréri a trouvé la trop de longueur, il n’a retenu que lib. VI exemplorum. Ses imprimeurs ayant transposé les chiffres nous donnent une édition des ouvrages de Marule, 1610, qui selon le Mire est de l’an 1601. Au reste, Gabriel Naudé, qui a fait une dissertation pour prouver qu’il est permis aux médecins de dire bien des mensonges à un malade, n’a pas manqué de citer notre Marule, qui a soutenu qu’un homme qui ment en faveur de la république, ou pour la plus grande gloire de Dieu, fait un acte de prudence insigne, et de piété singulière. Marulus Spalatensis lib. 4. memor. c. 4. ob Reipublicæ bonum vel majorem Dei gloriam mentiri fore summæ pietatis ingentisque prudentiæ contendit [3]. Oh ! la mauvaise morale !

  1. Gesner., in Biblioth., folio 495 verso.
  2. Aub. Miræus, de Scriptor. sæculi XVI, pag. 9.
  3. Naudæus, in Pentade Quæstion. Iatrophil., pag. 150, edit. Genev., 1647.

MARULLE, poëte de Calabre au Ve. siecle, vint trouver Attila à Padoue, après que ce roi des Huns se fut ouvert le chemin d’Italie par la prise d’Aquilée, et eut ruiné ou subjugué tout ce qui se présenta sur sa route. Ce poëte s’attendait à une ample récompense des flatteries dont il avait rempli le panégyrique d’Attila ; mais lorsque ce prince eût su par des interprètes, que le poëme que Marulle venait de réciter le faisait descendre des dieux, et le qualifiait dieu, il ordonna que ces vers, et celui qui les avait composés fussent brûlés. Il adoucit la peine, quand il eut fait réflexion que cette sévérité pourrait porter d’autres auteurs à ne pas écrire ses louanges [a].

  1. Ex Callimacho Experiente, in Vitâ Attilæ.

MARULLE (Michel Tarchaniote (A)) se retira en Italie après que les Turcs eurent pris Constantinople, où il était né. Ce ne fut point par zèle pour le christianisme qu’il abandonna son pays ; car ses sentimens en matière de religion étaient fort éloignés de l’orthodoxie (B). Ce fut sans doute la crainte de l’esclavage, ou l’envie de s’épargner le cruel chagrin de voir et d’ouïr les insultes d’un insolent vainqueur, qui l’éloignèrent de la Grèce. Il s’attacha au métier des armes en Italie (C) ; et servit dans la cavalerie sous Nicolas Ralla [a], qui était de Lacédémone. Il joignit les lettres avec les armes, et ne voulut pas être moins poëte que soldat : et comme il craignit qu’on ne trouvât pas assez extraordinaire qu’il sût faire des vers grecs, il s’appliqua soigneusement à l’étude de la poésie latine, et s’acquit par cet endroit-là beaucoup de réputation [b]. Ses vers latins consistent en quatre livres d’épigrammes, et en quatre livres d’hymnes. Il avait commencé un poëme de l’éducation des princes, qu’il n’acheva pas. Ce

  1. Jovius, in Elog., cap. XXVIII, militari stipendio sese alere coactus. Pier. Valer., de Litter. Infelicit., lib. II.
  2. Jovius, ibidem.