Page:Bayle - Dictionnaire historique et critique, 1820, T10.djvu/369

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
359
MECQUE.

çonnait de vouloir détruire l’ancienne religion, et d’aspirer à la tyrannie sous les auspices de la qualité de nouveau prophète [a], on s’opposa si vertement à ses complots, qu’il fut obligé de prendre la fuite [b] ; et ce ne fut que par voie de conquête militaire qu’il établit dans ce lieu-là sa nouvelle loi [c]. Il y eut une rude guerre entre lui et les Mecquois pendant six ans, depuis qu’il eut pris la fuite. Cela fut suivi d’un traité de trêve qui devait durer dix ans, mais qui n’en dura que deux [d] ; car en la huitième année de l’hégire [e], cet imposteur, accompagné de dix mille hommes, marcha contre la Mecque sous prétexte qu’elle avait violé la trêve, et la subjugua très-facilement. Il en bannit l’idolâtrie (E), et s’appliqua peu après à d’autres expéditions. Il alla en pèlerinage : à la Mecque, l’an 10 de l’hégire, et il y entra le grand jour de cette solennité. Les peuples accoururent en foule de tous les endroits de l’Arabie, pour voir leur nouveau maître : il les instruisit dans sa loi, après quoi il retourna à Médine, et il y mourut l’année suivante. Il avait eu la politique, pendant la trêve qu’il avait conclue avec les Mecquois, d’ordonner à ses sectateurs le pèlerinage de la Mecque. C’était une solennité que les Arabes avaient en vénération depuis plusieurs siècles (F) : il crut donc qu’en la conservant il les disposerait à subir plus tôt le nouveau joug qu’il leur voulait imposer ; et ce fut sans doute une chose qui fit un très-bon effet pour lui sur les habitans de la Mecque, puisqu’ils retiraient un très-grand profit de cette coutume religieuse ; et un avantage dont ils avaient beaucoup de besoin, car leur terroir est des plus ingrats et des plus stériles qu’il y ait au monde. On a vu ci-dessus [f] l’état lamentable où leur ville fut réduite au IVe. siècle de l’ère mahométane. Elle avait souffert, au premier siècle de la même époque [g], tout ce que les fureurs de la guerre ont coutume de produire. Quelques auteurs [h] disent que Soliman y érigea une académie, environ l’an 949 de l’hégire ; et que le collége qu’il y fit bâtir, et le revenu dont il le dota, furent dignes de sa magnificence. On ne s’accorde point quant à la situation de la Mecque. Le Dictionnaire de Moréri la pose à une journée de la mer Rouge. M. Baudrand l’en écarte de quarante milles arabiques, et M. d’Herbelot de trois journées. Quelques-uns [i] la mettent presque sous la ligne ; et d’autres à vingt-un degrés quarante minutes de latitude septentrionale [j]. L’usage des armes est interdit dans son territoire, qui est de six milles à l’orient, de

  1. Là même, pag. 24.
  2. Là même, pag. 73, 74.
  3. Voyez la remarque (E).
  4. Prideaux, Vie de Mahomet, p. 112.
  5. C’est la même chose que la fuite de Mahomet. Cette 8e. année de l’hégire répond à l’an 629.
  6. Dans l’article d’Abudhaher, tom. I, pag. 96.
  7. Voyez la Bibliothéque orientale de M. d’Herbelot, pag. 569.
  8. Gabr. Sionita et Johann. Hesronita, de nonnullis Oriental. Urbibus, pag. 19.
  9. Idem, ibidem, pag. 17.
  10. Voyez M. d’Herbelot, Bibliothéque orientale, pag. 569.