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MACRON.

M. Varillas avait apprise de M. Bouillaud. ] « Son[1] grand ami de Loudun, qui avait changé son nom de Mitron en celui de Macrin, valet de chambre du roi, poëte latin ; et grand imitateur de Catulle, comme lui ne fut pas plus heureux. On l’accusa devant le roi d’être de la nouvelle religion ; et sa majesté le menaça de le faire pendre, s’il en était convaincu. On ne sait s’il était coupable, et tout ce que l’on en peut dire est que presque tous les beaux esprits penchaient alors vers le calvinisme. La menace de sa majesté intimida Macrin jusque-là que, sortant du Louvre, voyant de loin un poulain, instrument dont les tonneliers se servent pour descendre le vin dans les caves, il le prit pour une potence, et en perdit l’esprit, de sorte qu’il se jeta et se noya dans le premier puits qu’il rencontra[2]. » L’autorité de M. Bouillaud[* 1], natif de Loudun, comme Macrin, et l’un des hommes du monde qui avait le plus de mémoire, et qui savait le mieux l’histoire des hommes doctes, donne un grand poids à ceci, et particulièrement si l’on suppose que M. Varillas mit par écrit tout aussitôt ce qu’il lui avait ouï dire. D’autre côté, quand on songe que Scévole de Sainte-Marthe, natif de Loudun, et plus voisin de ce temps-là que M. Bouillaud, assure que Salmon Macrin mourut de vieillesse à Loudun, où il s’était retiré depuis long-temps[3], on a de la peine à croire le récit de Varillas. Car comment se persuader qu’un accident si tragique demeure inconnu à tous les auteurs qui ont parlé de Macrin ; à Scévole de Sainte-Marthe, son compatriote, qui recherchait des mémoires de toutes parts ; à M. de Thou[4], qui n’en recherchait pas moins, etc. ? Mettons donc ceci entre les choses qui demandent une plus ample information, puisque non-seulement les meilleurs auteurs n’en parlent pas, mais aussi qu’ils font un narré destructif de celui-là[* 2].

(B) Macrin n’était pas le nom de famille de notre poëte[* 3]. ] Nous venons de voir que selon M. Varillas il changea son nom de Mitron, en celui de Macrin : mais selon M. Baillet [5] il s’appelait Jean Salmon[* 4] ; et, pour sa maigreur, il était souvent appelé en riant Macrinus, par le roi François Ier., de sorte que voyant que son nom de Jean ne plaisait point a sa femme, il s’en défit, et s’appela pour toujours Salmonius Macrinus.

Ceci se trouve dans la bibliothéque de du Verdier Vau-Privas, et d’une manière qui marque plus clairement la raison pourquoi notre Macrin, ayant égard à sa femme, changea de nom : Jean Salmon, ayant laissé le nom propre, qui par aventure lui fâchait à cause de sa femme, print pour nom propre Salmon, etc.[6].

  1. * Le nom de ce personnage est Boulliau ; il ne signait jamais autrement. On peut à ce sujet consulter la Bibliothéque historique du Poitou, par Dreux du Radier, IV, 275-76.
  2. * Salmon Macrin mourut en 1557, dit Dreux du Radier ; et le récit de Varillas est relégué parmi les fables.
  3. (*) Le non français de ce poëte était Maigret. De Macrinus, comme il s’est nommé dans ses poésies latines, a été fait celui de Macrin qui est demeuré. Voyez Fauchet, liv. IV, chap. XIV de ses Antiquités. Rem. crit.
  4. * Dreux du Radier dit qu’il est certain que Salmon était son nom ; et il en apporte des preuves. Macrin n’était qu’un surnom. Leclerc fait venir ce nom de Maternus.
  1. C’est-à-dire, de Marot.
  2. Varillas, Histoire de l’Hérésie, tom. V, liv. XXI, pag. m. 50, 55. Il met en marge : J’ai appris ces particularités du savant M. Bouillaud.
  3. Vitæ cœlibis pariter et aulicæ pertæsus, uxorem duxit, civem suam... mortuamque suis et amicorum versibus... commendavit, susceptis ex eâ utriusque sexùs liberis... domi suæ senio planè confectus occidisset. Sammarthanus, in Elog., lib. I, pag. m. 21, 22.
  4. Thuan., l. XIX, sub fin., ad ann. 1557.
  5. Jugem. sur les Poëtes, tom. III, num. 1293, pag. 258
  6. Du Verdier, Bibliothéque française, pag. 754.

MACRON (Nævius Sertorius), s’acquit une grande autorité sous l’empire de Tibère. Il fut l’un des principaux instrumens de la ruine de Séjan, et son successeur à la charge de capitaine des gardes[a]. Il le surpassait en finesse, et principalement lorsqu’il s’agissait de faire périr un ennemi (A). Il refusa les honneurs qui lui furent décernés par le sénat

  1. Dio, lib. LVIII, pag. m. 718.