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PÉRICLÉS.

ces médisances (F), et il aurait pu passer pour heureux, s’il n’avait pas été exposé à d’autres maux ; mais il éprouva par bien des endroits la malignité de la fortune, et principalement dans son domestique [a] (G) ; car il fut malheureux et en femme et en enfans. Il y a une réflexion à faire sur les médisances qui coururent contre lui (H). Il mourut la troisième aunée de la guerre du Péloponnèse [b], après une longue maladie qui lui avait affaibli le jugement (I). Néanmoins un peu avant que d’expirer, il dit une chose très-sensée, et qui a fait faire à Plutarque une réflexion solide sur la nature de Dieu (K) ; mais cet auteur allait trop loin : il outrait l’idée de la bonté souveraine : il ne voulait pas que jamais elle pût nuire, et il aimait mieux imputer le mal à une autre cause. Nous verrons. à ce sujet l’une de ses preuves de la malignité d’Hérodote, et ce que l’on y a répondu. Cette preuve est tirée de l’humeur jalouse, et de l’esprit envieux à quoi cet historien prétend que la nature divine est sujette (L). Valère Maxime est tombé dans une erreur qu’il ne faudra pas laisser passer, et qui nous donnera lieu de mettre ici un aphorisme de politique (M). La sœur de Cimon s’avisa un jour de critiquer la conduite de Périclès, et ne s’en trouva pas bien. La réponse qu’il lui fit nous fait connaître qu’il avait l’esprit présent (N). J’ai fait espérer qu’on verrait ici l’histoire de la fameuse Aspasie (O) ; et je tiendrai ma parole. Voyer la remarque (O). Je ferai aussi un petit recueil de quelques erreurs qui se rapportent à cette femme (P). Je n’oublierai point les fautes de M. Moréri (Q), ni celles de son continuateur, ni celles d’un autre écrivain français touchant Périclès (R). J’aurai là une occasion de faire observer les injustices et les désordres qui régnaient souvent sous l’état républicain des Athéniens (S).

L’expédition de Samos, dont je touche les motifs dans l’une de mes remarques [c], fut de toutes les actions de Périclès celle que les écrivains empoisonnèrent avec le plus de malignité [d]. Plutarque vous l’apprendra, mais il a omis une circonstance odieuse qu’il eût pu trouver dans Alexis le Samien, au second livre des Confins de Samos. Cet auteur avait observé que les garces qui suivirent Périclès dans cette expédition firent un gain si considérable, qu’elles bâtirent à Samos le temple de Vénus surnommée des roseaux, ou des marais (T). C’était reprocher à ce général, qu’il avait mal observé la discipline militaire.

  1. Tiré de Plutarque, Vie de Périclès.
  2. Thucydides, lib. II, pag. m. 118 : c’était la 3e. de la 87e. olympiade.
  3. Ci-dessous citat. (167).
  4. Voyez Plutarque dans la Vie de Périclès, pag. 166 et suiv.

(A) Il apprit d’Anaxagoras à craindre. les dieux sans superstition. ] Le peuple d’Athènes s’alarmait mal à propos, dès qu’il paraissait en l’air quelque phénomène peu commun. Il s’imaginait que c’étaient des signes de la colère des dieux. Le philosophe Anaxagores délivra Périclès de cette crainte, en lui expliquant par des raisons naturelles l’apparition de ces météores. Ainsi il lui inspira une religion plus raisonnable, qui n’était pas inquiétée par des frayeurs