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ADAM.

voyé à Loudun pour y prêcher pendant que ceux de la religion tinrent un synode national, sur la fin de l’année 1659. Ce fut apparemment ce qui l’engagea à la composition d’un ouvrage qui l’a fait connaître aux protestans de France plus qu’autre chose, et plus que bien des auteurs de la première volée n’en sont connus. Un ministre de Poitiers[a], ayant changé de religion peu après la clôture de ce synode, écrivit une lettre où il critiqua fort malignement le jeûne que cette compagnie avait ordonné à toutes les églises réformées du royaume[b]. M. Daillé, qui avait été le modérateur de cette assemblée, répondit à la lettre de cet ex-ministre. Celui-ci lui répliqua : le père Adam voulut être de la partie, et publia une réponse à l’écrit de M. Daillé (H), l’an 1660. M. Daillé leur répondit à tous deux dans un même livre. Il n’a peut-être jamais fait d’ouvrage qui lui ait mieux réussi que celui-là, ni qui ait été tant lu par toutes sortes de gens, parmi ceux de la religion ; et voilà pourquoi le père Adam, qui s’y trouve presque à chaque période, et souvent sous un caractere d’esprit qui fait impression, leur est plus connu que cent auteurs qui le surpassent. Cet ouvrage de M. Daillé demeura sans repartie (I), et il ne faut pas s’en étonner : ceux qui auraient dû répliquer n’étaient pas de la force d’un tel adversaire, qui, même dans une mauvaise cause, aurait pu les mener battant. Je ne sais point en quelle année le père Adam fut le procureur de la province de Champagne à Rome : la Bibliothéque des jésuites ne le marque pas[c] ; mais elle m’apprend qu’en 1674 il était supérieur de la maison professe à Bordeaux. Je pense qu’il mourut dans cet emploi environ l’an 1660. Il avait publié quelques sermons de controverse sur la matière de l’eucharistie, qui fut l’évangile du jour par toute la France pendant la querelle de M. Arnaud et de M. Claude : il les avait, dis-je, publiés depuis l’impression de l’ouvrage du père Sotuel, et il les avait prêchés, je pense, dans le fort de cette contestation. Ils ne sont pas mal tournés ; mais ils tiennent un peu trop du dramatique par le personnage d’interlocuteur qu’on y donne quelquefois à M. Claude. Je n’en parle que par ouï-dire. Le père Adam passa par les mains du père Jarrige, mais beaucoup plus doucement que plusieurs autres, et il en fut quitte à bon marché (K). Au reste, il ne fut pas le premier qui parla peu obligeamment de saint Augustin (L), et qui tâcha de persuader que saint Paul outrait les choses[* 1] par son tempérament trop vif (M).

  1. * Au chapitre II du livre II de la Confession de Sancy, il est parlé d’un frère Gilles qui disait que S. Paul se serait bien passé de dire beaucoup de choses qui sentaient le fagot. Rem. Crit.

    L. J. Leclerc nie que le père Adam ait pris à tâche de persuader que saint Paul outrait des choses.

  1. Il s’appelait M. Cottibi.
  2. Voyez la Vie de M. Daillé, pag. 33 et suiv.
  3. Rexit collegium Sedanense in provinciâ Campaniæ, à quâ electus est Procurator ad urbem. Sotuel, Biblioth. Societ. Jesu, pag. 397.

(A) A été un fameux prédicateur. ] Voyez la lettre que M. de Balzac lui écrivit le 15 de janvier 1643[1], après

  1. Cette Lettre est la onzième du livre III de