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Page:Beaugrand - Jeanne la fileuse, 1878.djvu/124

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Pierre se rendit donc sur la grève pour commencer son travail, après avoir décidé d’attendre l’heure du midi pour faire part à son père des événements de la veille. Le fermier qui dirigeait tout se trouvait trop occupé, pendant les premières heures de la matinée, pour avoir l’occasion, de son côté, de communiquer à son fils ses projets de mariage et d’établissement. Chacun attendait l’occasion favorable de s’expliquer, sans se douter le moins du monde des doubles projets que l’on avait en vue. Les travaux de chargement commencèrent avec lenteur, car il était nécessaire d’établir un va-et-vient continuel entre le rivage et les bateaux, pour régulariser le travail des hommes de ferme et des marins. Vers dix heures du matin, à un moment où les allèges se trouvaient au large, près des bateaux, le fermier se rencontra sur la grève, seul, avec son fils ; et comme il devait s’écouler près d’une heure avant le retour des marins, la conversation s’engagea insensiblement et le père Montépel se décida à aborder la grande question :

— Nous avons causé, ta mère et moi, commença le vieillard en s’adressant à son fils, sur le sujet fort important de ton établissement prochain, et après avoir examiné la question sous toutes ses faces, nous en sommes arrivés à la décision de te lancer dans le commerce. Il s’agissait de trouver