Page:Beaugrand - Jeanne la fileuse, 1878.djvu/136

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n’auront à souffrir de ma conduite. Ce que je ferai, je l’ignore. J’ai bon bras, bon œil, bonne volonté et avec ces qualités-là, on va loin maintenant. Je ne demande qu’une chose : ne soyez pas injuste envers moi en m’accusant d’orgueil et d’entêtement volontaire. Ce que je fais aujourd’hui je le fais avec la conscience de bien faire et puisqu’il nous est impossible de vivre en paix sous le même toit, il est de mon devoir de partir. Je partirai donc et laissez-moi vous demander une dernière fois, mon père, de ne pas rendre ma fiancée d’aujourd’hui, ma femme de bientôt, responsable d’un passé malheureux. La pauvre enfant n’y peut rien faire, et son père m’a raconté avec la plus grande franchise les détails de cette regrettable affaire, avant de m’accorder sa main. Vous voyez que je sais tout et c’est après avoir réfléchi sérieusement que je viens vous dire une dernière fois que j’aime Jeanne Girard et que j’ai l’intention d’en faire ma femme.

Pierre, en finissant de parler, s’était approché de sa mère qui sanglotait à l’écart et l’avait serrée dans ses bras après avoir déposé un baiser affectueux sur les cheveux blancs de la pauvre femme qui aurait donné tout au monde pour éviter ces scènes regrettables au sein de sa famille. Le vieillard continuait à arpenter la salle et il était facile