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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

— Fuyons ! reprit Charles, j’entends des pas. Si ce n’est qu’un simple curieux, j’en aurai bientôt fini avec lui. Madame, votre bras, veuillez prendre mon manteau.

Les pas se rapprochaient en ce moment de la cahute… Le jeune homme ouvrit la lucarne… mais il ne vit rien, tant la brume du matin était épaisse… Il mit la duchesse derrière lui, et il tira son épée…

Pendant qu’il se préparait ainsi à faire bonne contenance, la duchesse cherchait de ses mains désespérées à faire céder la porte de la seule armoire que le passeux possédât…

— C’est là, ce me semble, qu’il a placé ce que je lui confiai, se disait-elle.

Au bruit que la porte légère de l’armoire fit en cédant, Charles se retourna :

— Que faites-vous ? lui demanda-t-il.

— Vide !… murmura—t—elle avec un sourire insensé… vide !… Oh ! mon Dieu, plus d’espoir ! Ce misérable était dépositaire de mon secret, il l’aura vendu ! Le ciel me venge !

Elle poussa du pied le corps du passeux, dans une rage frénétique… En cet instant même, la porte de la cahute s’ouvrit ; un personnage, vêtu d’un long domino de satin noir, et portant un masque bleu sous un feutre gris à plume blanche, apparut aux regards de Charles et de la duchesse…

— Qui es-tu ? réponds, demanda Charles en lui barrant le chemin avec son épée.

— Perdue ! s’écria la duchesse avec angoisse.

— Sauvée, reprit le masque, d’une voix qu’il cherchait à rendre sourde… Mais ce n’est pas à vous, ajouta-t-il, c’est à ce cavalier que j’ai affaire.

– À moi ? demanda Charles. Vous n’avez pas même d’épée ; est-ce un duel qu’il vous faut ?

— Non pas un duel, mais un pacte. Le jour venu, la justice sera ici ; je me charge de te soustraire à sa vengeance.

— Vous, mon gentilhomme, balbutia Charles ; vous me connaissez donc ? Vous avez su…