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LES MYSTÈRES DE L’ÎLE SAINT-LOUIS

a tous deux. On va bientôt nous coudre dans le même linceul ; on nous enterrera dans la même fosse… Ah ! ah ! ah ! poursuivit Samuel avec son rire effrayant, tous deux réunis, tous deux !

La porte du caveau s’ébranla soudain sur ses gonds. Charles et Mariette descendaient dans ces limbes qui les remplirent d’épouvante.

— Ma fille !… murmura Pompeo dans un suprême et dernier effort, ma fille ! Était-ce ainsi que je devais te revoir !…

Mariette et Charles portaient des habits de deuil. Les sanglots étouffèrent leurs voix en voyant l’affreuse décomposition de Pompeo.

— Votre main dit-il à Charles d’une voix étranglée par l’agonie, votre main… vous êtes un noble cœur, j’ai lu votre lettre à la duchesse…

— Mon père ! mon ami ! reprit Mariette en pleurant, mon père, il vous eût aimé autant que moi !

— Mes enfants, mes chers enfants… je ne vous quitterai pas sans vous unir… dit Pompeo l’œil déjà vitré par la mort, tous deux fiancés, tous deux… Mais Teresina, où donc est-elle, où donc ? Ah j’eusse voulu…

— Arrêtée par l’ordre de Richelieu… répondit Samuel se roidissant lui-même contre le râle. Va, je meurs content, elle est perdue !

— Sauvée ! reprit une voix qui éclata au sein des ténèbres du souterrain.

— Bellerose ! s’écrièrent Charles et Mariette.

— Oui, dit Bellerose, cherchant à reprendre haleine, et terrifié du spectacle horrible qu’il rencontrait, une voiture de la reine mère vient d’emmener subitement la duchesse au moment même où les ordres du cardinal allaient se voir exécutés contre elle. Pompeo, vous êtes vengé… le règne de Richelieu est fini, et celui de Mazarin commence… et il commence par un acte de justice. Capitaine emparez-vous de cet homme, qui tout à l’heure va être un cadavre !