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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

dame de Guise, d’où Saint-Mégrin s’élança autrefois à son honneur.

Cependant Paquette remplissait déjà sa nouvelle fonction de surintendante des oiseaux de Mademoiselle ; les jasmins et les roses répandaient autour d’elle la suavité de leurs parfums. Elle sautillait vive et folâtre, heureuse de se retrouver une fois encore avec ces captifs ailés, dont le treillage léger lui rappelait peut-être d’autres grilles plus tristes ; elle semblait joyeuse de les voir et de leur parler.

Un massif profond entourait la grotte à laquelle se trouvait adossée la riche volière, il cachait par intervalle l’aimable fille aux regards avides de Lauzun.

Tout d’un coup Paquette, en se retournant, leva les yeux et elle vit le comte a deux pas d’elle.

Léger comme un page, il avait sauté sur un plan de géraniums, après avoir eu soin de déposer son épée sur un coussin de l’appartement.

Le cœur de Paquette battit avec force ; elle n’osa crier, car Lauzun lui imposait silence par un geste qui pouvait ressembler à une prière.

— Rassure-toi, Paquette, dit le comte avec empressement, je venais te dire bonjour.

— Comment ! par ce chemin ? reprit-elle en lui indiquant la fenêtre.

— La princesse ne m’a pas laissé le choix d’un autre.

— Vous étiez donc enfermé ?

— Eh bien, oui ; n’est-ce pas là mon lot ordinaire ?

— Vous n’êtes donc pas libre ?

— Nullement, Paquette, je commence à croire que je suis en cage comme tes oiseaux.

— Vous raillez.

— Non, je deviens philosophe. Là-bas un cachot, ici un palais ; à Pignerol un geôlier, à Paris une geôlière ; tu le vois, je suis, je serai toujours prisonnier.

— C’est comme moi, nous étions vraiment plus heureux à Pignerol, reprit Paquette avec un soupir.