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CHAPITRE XVIII.

la cause dont le châtiment est l’effet nécessaire et inséparable[1].

C’est la liaison des idées qui soutient tout l’édifice de l’entendement humain. Sans elle le plaisir et la douleur seraient des sentimens isolés, sans effet, aussitôt oubliés que sentis. Les hommes qui manquent d’idées générales et de principes universels, c’est-à-dire, les hommes ignorans et abrutis, n’agissent que d’après les idées les plus voisines et les plus immédiatement unies. Ils négligent les rapports éloignés, et ces idées compliquées, qui ne se présentent qu’à l’homme fortement passionné pour un objet, ou aux esprits éclairés. La lumière de l’attention dissipe chez l’homme passionné les ténèbres qui environnent le vulgaire. L’homme instruit,

  1. « Dès que l’exemple du crime est donné, il n’y a plus un moment à perdre, il faut que celui du châtiment le suive. Tout est perdu si l’on diffère ; et peut-être, une foule de mauvais citoyens n’attendait que la première étincelle de l’exemple, pour enflammer des vices déjà tout préparés… Voilà le grand but de la justice criminelle, un exemple pour l’avenir, plutôt que la vengeance du passé. La vengeance est une passion, et les lois en sont exemptes. » (Servan, Discours sur l’administration de la Justice criminelle.)