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DES DÉLITS ET DES PEINES

L’homme tremble à l’idée des maux les plus légers, lorsqu’il voit l’impossibilité de s’y soustraire ; au lieu que l’espérance, cette douce fille du ciel, qui souvent nous tient lieu de tous les biens, éloigne sans cesse l’idée des tourmens les plus cruels, pour peu qu’elle soit soutenue par l’exemple de l’impunité, que la faiblesse ou l’amour de l’or n’accorde que trop souvent.

Quelquefois on s’abstient de punir un délit peu important, lorsque l’offensé le pardonne. C’est un acte de bienfaisance, mais un acte contraire au bien public. Un particulier peut bien ne pas exiger la réparation du tort qu’on lui a fait ; mais le pardon qu’il accorde ne peut détruire la nécessité de l’exemple.

Le droit de punir n’appartient à aucun citoyen en particulier ; il appartient aux lois, qui sont l’organe de la volonté de tous. Un citoyen offensé peut renoncer à sa portion de

    À peine l’idée du crime se présente, qu’il la comprime dans le fond de son âme, et il craint encore que l’œil perçant du magistrat ne la surprenne. Il fuit enfin une terre qui ne supporte pas le vice, ou devient bon, en perdant l’espérance d’être méchant avec impunité. » (Servan, Discours sur l’administration de la justice criminelle.)