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CHAPITRE XXIV.



    un genre d’action où elle n’est point nécessaire : il détruit la liberté des citoyens, en armant contre eux, le zèle des consciences timides, et celui des consciences hardies.

    » Le mal est venu de cette idée, qu’il faut venger la Divinité. Mais il faut faire honorer la Divinité, et ne la venger jamais. En effet, si l’on se conduisait par cette dernière idée, quelle serait la fin des supplices ? Si les lois des hommes ont à venger un être infini, elles se régleront sur son infinité, et non pas sur les faiblesses, sur les ignorances, sur les caprices de la nature humaine.

    » Un historien de Provence rapporte un fait qui nous peint très-bien ce que peut produire sur des esprits faibles cette idée de venger la Divinité. Un Juif, accusé d’avoir blasphémé contre la Sainte Vierge, fut condamné à être écorché. Des chevaliers masqués, le couteau à la main, montèrent sur l’échafaud, et en chassèrent l’exécuteur, pour venger eux-mêmes l’honneur de la Sainte Vierge… Je ne veux point prévenir les réflexions du lecteur. » (Montesquieu, De l’esprit des lois, Liv. XII, chap. 4.)