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SUPP. AU CHAP. XXX.

est juste ou illégitime : nous ne pouvons que déplorer leur sort, et encore plus celui du matelot, qu’on force souvent de quitter une honnête occupation, pour souiller ses mains d’un sang peut-être innocent : mais il me semble que des négocians, libres de cette violence, de cette obligation forcée, et que l’éducation a doués de plus grandes lumières, il me semble, dis-je, qu’il faudrait que de pareils hommes examinassent si la guerre est juste, avant de recruter une troupe de coquins, pour les envoyer attaquer leurs confrères les négocians d’une nation voisine, les dépouiller de leurs biens, et peut-être les ruiner eux et leur famille, s’ils les abandonnent, ou les blesser, les estropier et les massacrer, s’ils tâchent de les défendre. C’est cependant ce que pratiquent les négocians chrétiens, que la guerre soit juste ou qu’elle ne le soit pas ; et il est bien difficile qu’elle le soit des deux côtés. C’est ce que pratiquent des négocians anglais et américains, qui néanmoins se plaignent d’un vol particulier, et font pendre par douzaines ceux qui n’ont fait que suivre leur exemple. Il est plus que temps, que par égard pour l’humanité, on mette un terme à cette infamie. Les États-Unis de l’Amérique, quoique mieux situés qu’aucune nation européenne, pour tirer parti de la piraterie, la plus grande partie des vaisseaux marchands destinés pour les Indes passant à leurs portes, s’efforcent autant qu’il est en leur pouvoir d’abolir cette coutume, en