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DES DÉLITS ET DES PEINES.

Voici une proposition bien simple : ou le délit est certain, ou il est incertain. S’il est certain, il ne doit être puni que de la peine fixée par la loi, et la torture est inutile, puisqu’on n’a plus besoin des aveux du coupable. Si le délit est incertain, n’est-il pas affreux de tourmenter un innocent ? Car, devant les lois, celui-là est innocent dont le délit n’est pas prouvé.

Quel est le but politique des châtimens ? La terreur qu’ils impriment dans les cœurs portés au crime.

Mais que doit-on penser des tortures, de ces supplices secrets que la tyrannie emploie dans l’obscurité des cachots, et qui sont réservés à l’innocent comme au coupable ?

Il est important qu’aucun délit connu ne demeure impuni ; mais il n’est pas toujours utile de découvrir l’auteur d’un délit enseveli dans les ténèbres de l’incertitude.

Un crime déjà commis, auquel il n’y a plus de remède, ne peut être puni par la société politique, que pour empêcher les autres hommes d’en commettre de semblables par l’espérance de l’impunité[1].

  1. Si l’auteur avait dit : « Un crime ne peut être puni que pour empêcher que d’autres hommes n’en