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CHAPITRE XII.

S’il est vrai que la plupart des hommes respectent les lois par crainte ou par vertu ; s’il est probable qu’un citoyen les aura plutôt suivies que violées, un juge, en ordonnant la torture, s’expose continuellement à tourmenter un innocent.

Je dirai encore qu’il est monstrueux et absurde d’exiger qu’un homme soit lui-même son accusateur[1] ; de chercher à faire naître la vérité par les tourmens, comme si cette vérité résidait dans les muscles et dans les fibres du malheureux ! La loi qui autorise la torture est une loi qui dit : « Hommes, résistez à la douleur. La nature vous a donné

    commettent de semblables, ou que le même homme n’en commette de nouveaux », il aurait senti lui-même le vice de son raisonnement. Tant que l’auteur d’un crime est caché, il est impuni, il est libre, il peut donc faire de sa liberté le même usage qu’il en a fait. Il est donc très-utile qu’il soit découvert, pour être mis hors d’état de nuire. (Note de Diderot.)

  1. « Quiconque s’avoue coupable d’un crime doit être cru en démence ; on ne peut s’accuser soi-même que dans un moment de fureur, ou dans une sorte d’ivresse, ou par méprise, ou par la violence de la douleur, ou par l’effroi des tortures. Nul homme ne peut parler contre lui, pour sa ruine, s’il n’y est forcé. » (Quintiliani Declam.)