Page:Becq de Fouquières - L’Art de la mise en scène, 1884.djvu/208

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que nous tenons dans le champ de notre lorgnette et qui, selon les dispositions relatives que nous donnons aux foyers des lentilles, se rapprochent et se précisent ou s'éloignent en se diffusant. Le comédien doit donc s'efforcer de bien discerner les traits dont se composent les idées des spectateurs; et son ambition constante est de découvrir quelques-uns des caractères communs, si faibles qu'ils soient, que ses prédécesseurs ont négligé de mettre en évidence; enfin de se rendre compte des modifications que le temps ou des circonstances particulières ont apporté à ces idées. C'est en ce sens que le comédien doit toujours étudier la nature; car il est nécessaire qu'il compare, le plus souvent possible, la présentation et la représentation des phénomènes, afin de discerner si les traits dont il revêt ses imitations ont bien tous le caractère général qui sera pour tous les spectateurs la marque de la vérité, et de découvrir peut-être quelque trait nouveau qui soit de nature à rendre la ressemblance plus parfaite.

Si, par suite de circonstances fortuites, les hommes d'une génération ont été à même d'observer plus souvent ou mieux que ceux qui les ont précédés un certain ordre de faits, l'idée qu'ils en conçoivent sera sensiblement différente de celle qu'en possédaient les générations antérieures; et le comédien, s'il a de l'intuition et de la pénétration, ne se contentera plus pour les représenter des traditions de métier, mais modifiera son jeu de manière à reproduire l'image actuelle et à trouver sa ressemblance exacte. Supposons