Page:Bedier - La Chanson de Roland.djvu/137

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milliers. Sur les cent mille, il ne s’en est pas sauvé deux. L’archevêque dit : « Nos hommes sont très preux ; sous le ciel aucun roi n’en a de meilleurs. Il est écrit aux Annales des Francs que […] » Ils vont par le champ et cherchent les leurs ; ils pleurent de deuil et de pitié sur leurs parents, du fond du cœur, en leur amour. Vient contre eux, avec sa grande armée, le roi Marsile.

CXII

Marsile vient le long d’une vallée, avec la grande armée qu’il amassa. Il a formé et compté vingt corps de bataille. Les heaumes aux pierreries serties dans l’or brillent, et les écus, et les brognes safrées. Sept mille clairons sonnent la charge, grand est le bruit par toute la contrée. Roland dit : « Olivier, compagnon, frère, Ganelon le félon a juré notre mort. La trahison ne peut rester cachée ; l’empereur en prendra forte vengeance. Nous aurons une bataille âpre et dure ; jamais homme n’aura vu pareille rencontre. J’y frapperai de Durendal, mon épée, et vous, compagnon, vous frapperez de Hauteclaire. Par tant de terres nous les avons portées ! Nous avons gagné par elles tant de batailles ! Il ne faut pas que l’on chante d’elles une mauvaise chanson.