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Page:Benjamin - Antoine déchaîné, 1923.djvu/158

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ANTOINE DÉCHAÎNÉ

ne voulez pas faire ce que je dis, ne le faites pas ; continuez vos ronds de bras et toute votre pâtisserie. Mais ne discutez jamais. C’est d’un amour-propre puéril qui aggrave votre cas !

Aussi clairement que les autres jours il voit les faiblesses et les défauts, mais il semble aujourd’hui que le vent actif et toujours jeune de cette Provence lui soit un conseiller merveilleux. Le vent a l’air de lui dire : « Tout passe… comme moi : la beauté… et la bêtise… Une de plus… une de moins ; je suis là qui souffle pour emporter tout. » Antoine entend et comprend.

Il remonte vers la ferme. Bêtes et gens y ont une vie simple, lente et merveilleuse, qu’il voudrait d’abord ne pas déranger, pour y mêler doucement, si possible, la vie, hélas ! artificielle de ses cabotins. Voici deux mules, chargées de leurs colliers rouges, qui sortent de l’écurie. Le premier frémissement des naseaux à l’air du dehors, l’œil noir et brillant, l’oreille qui pointe : « Quelle vérité ! » pense Antoine. Comment la saisir ? Com-