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Page:Benjamin - Antoine déchaîné, 1923.djvu/159

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ANTOINE DÉCHAÎNÉ

ment la garder ? Ah ! cinéma impuissant et dérisoire ! … Que faire aussi pour ne pas troubler ces deux colombes, qui sont, bec à bec, unies si tendrement sur la margelle du puits ? Se doutent-elles qu’on essaye de ranimer dans cette demeure une vieille histoire d’amour ? Sont-elles un symbole, elles, divinement blanches, avec leurs pattes fragiles, du même rose que les tuiles du toit ?

Hélas ! la cantatrice les fera fuir. Elle sort, s’agite, demande de l’eau de Vichy. Antoine ricane… Hélas ! le Sociétaire s’approchera aussi des mules et voudra compter leurs dents pour savoir leur âge. Hélas ! l’Arlésienne dira :

— Alors, Ça ne fait pas l’amour, ces animaux-là ?

— Dame, il paraît que non, dit le Sociétaire.

— Où avez-vous pris ça ? fait le Régisseur.

— Qu’est-ce que vous dites qu’ils ne font pas ? demande l’Innocent.

Antoine est provisoirement résigné. L’après-midi est si beau… Montmajour, cette splendeur