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LE MAJOR PIPE ET SON PÈRE

Il avait un charmant bon visage, plein d’une bienveillante curiosité. Il expliqua, remontant avec Barbet :

— C’est sans doute le machine des télégrammes, n’est-ce pas ? Il marche toute seule. Extrêmement commode… mais il sait point ouvrir le porte… Ah ! Ah !

M. John Pipe paraissait bien aussi gai que son fils James. C’était un homme plus menu et aussi plus expressif. Les yeux surtout étaient étonnants, dans une figure maigre et colorée, — des yeux clairs, rêveurs, ayant l’air de chercher un nuage, — au-dessus de deux pommettes rouges, superposées, tandis que le bas des joues et le menton étaient noirs d’une barbe sans cesse rasée. Des lèvres fines, un nez mince, un long cou, une tête un peu surprise mais attentive et complaisante, le teint trop coloré avec un regard de vrai poète, quelque chose enfin d’étrange et pourtant d’attirant, une maigreur ou pointait l’intelligence et, en dépit d’un physique presque drôle, une âme candide et fraîche qui mettait une lueur dans les prunelles.

Il plut à Barbet qui, en examinant cette tête, songeait à la sienne et se disait : « C’est curieux qu’il m’ait reconnu tout de suite. »