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Page:Benjamin - Le Major Pipe et son père, 1918.djvu/236

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LE MAJOR PIPE ET SON PÈRE

poli, que si j’y étais resté, je serais devenu fou… Que Dieu, monsieur, vous aide, puisqu’il a fait la France !

— Je ne dis pas, reprit Barbet agacé, mais tout de même…

— Regardez, regardez, fit vivement le capitaine, comment ça est bien joué et intéressant !

— Ah ! very, ça very ! balbutia Barbet, qui ne savait plus trop dans quelle langue il parlait.

Et il vit encore le sergent reprocher vertement à un homme de ne pas s’être rasé, l’homme humilié se raser mal, prendre la glace du périscope, et au lieu de la remettre en place, la fourrer négligemment dans sa chemise, au fond de son sac. Un quart d’heure se passe. Les Boches attaquent. Affolement ; bousculade. Tout le monde cherche le périscope ; personne ne le trouve. La tranchée est prise : dix tués, vingt prisonniers.

— Ah ! Ah ! s’esclaffa le capitaine, ils jouent bien, hein ?

Et il recommença, se tournant vers ses troupes :

— Voilà : à cause d’un idiot !

Barbet s’était levé. Ses pensées le dressaient. Il dit :

— Vous êtes un peuple de grands réalistes. Des faits, pas de phrases.