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SOCIÉTÉ ROYALE DU CANADA

premières occupaient les portages de la Chaudière et du Rideau (où est la ville d’Ottawa) ; la troisième surveillait le Long-Saut ; la quatrième se tenait dans les lacs des Deux-Montagnes et Saint-Louis ; la cinquième occupait l’île même de Montréal ; la sixième interceptait le passage de la branche nord de l’Ottawa ou rivière des Prairies ; les septième, huitième et neuvième se tenaient sur le Richelieu, le lac Saint-Pierre et aux environs de Trois-Rivières ; la dixième, enfin, colonne volante et plus considérable se réservait pour l’attaque du pays des Hurons.

Au printemps de cette année, le P. Bressani fut enlevé près de Trois-Rivières et ses compagnons sauvages massacrés. Dans la bande qui exécuta ce coup, il y avait six Hurons et trois Loups (Mohicans) naturalisés Iroquois. Pendant un demi siècle on rencontre dans les rangs des Cinq-Nations des mélanges de ce genre provenant des peuples conquis. En septembre (1644). M. William Kieft — gouverneur général de la Nouvelle-Belgique, tira le père Bressani des mains de ses bourreaux et le fit passer en Hollande.

Au mois de juillet 1644 arrivèrent de France un certain nombre de personnes, parmi lesquelles une compagnie de soldats commandée par un nommé Labarre. Les Iroquois régnaient en maîtres par tout le Canada, mais comprenant que la chance des armes pouvait tourner contre eux si les troupes françaises entraient en lutte, ils parlèrent de la paix, espérant par cette démarche faire discontinuer l’envoi des renforts de cette nature, et calculant bien qu’il serait toujours temps, une fois la quiétude rétablie parmi nous, de préparer quelque terrible surprise contre la colonie, ou les Hurons ou les Algonquins, et peut-être les trois ensemble. Ce stratagème leur réussissait invariablement, pare que les Français s’y laissaient prendre avec une incroyable facilité, et d’ailleurs, ils n’étaient pas en mesure d’agir autrement. Vingt-deux soldats partirent, l’automne de 1644 avec les Hurons descendus à la grande traite de Trois-Rivières ; ils revinrent à Trois-Rivières le 7 septembre 1645 en compagnie de soixante canots hurons chargés de pelleteries. Il y eut en ce lieu une assemblée solennelle de toutes les nations, où la paix générale fut proclamée à la demande des chefs iroquois ; mais une année ne s’était pas écoulée après cela, que ceux-ci levaient la hache de guerre en apprenant que la France ne promettait aucun nouveau secours à la colonie. Tous les Français du Canada ne comptaient que quelques centaines d’âmes (hommes, femmes, enfants, religieux et religieuses) réunies en trois endroits : Québec, Trois-Rivières, et Québec.

Les Iroquois reparurent en armes, l’automne de 1646, au moment où le P. Jogues s’embarquait à Trois-Rivières pour aller passer l’hiver parmi eux selon qu’ils en avaient exprimé le désir. Ce missionnaire fut assommé d’un coup de hache et l’on fit également périr Lalande, son domestique. Nous donnerons plus tard la liste des personnes massacrées, de 1636 à 1664, par les Iroquois.