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LA GUERRE DES IROQUOIS

établissements. M. de Montmagny, dès longtemps découragé d’un tel état de choses, fut rappelé en 1648, et M. d’Ailleboust, son successeur ne possédait ni argent ni aide d’aucune sorte pour remédier à la situation. Il fut remplacé en 1651 par M.de Lauzon, qui trouva moyen d’aggraver nos misères et nos périls en ne s’occupant à peu près que de ses intérêts personnels.

L’affaire des Andastes paraît avoir décidé les Iroquois à en finir pour jamais avec les Hurons. Ils se sentaient capables d’exécuter ce projet et choisissait le moment où les nouvelles de France ne parlaient que de guerre contre les Espagnols, de révoltes dans l’intérieur du royaume et de tueries identiques à celles que nos sauvages commettaient de temps en temps.

Un grand massacre eut lieu le 4 juillet 1648 à la bourgade Saint-Joseph, du pays des Hurons, d’où les guerriers étaient absents. Le P. Antoine Daniel mourut percé de flèches et son corps fut jeté dans la chapelle incendiée avec tout le village.

Au mois de juillet 1648, les Iroquois bloquaient Trois-Rivières lorsqu’arrivèrent inopinément deux cent cinquante Hurons conduits par cinq chefs de guerre renommés, avec le P. Bressani et trois Français, et qui firent lever le siège de la place. La traite eut lieu comme autrefois. Au commencement d’août, les cinquante ou soixante canots hurons repartirent, embarquant « vingt-six Français : cinq pères, un frère, trois enfants, neuf travaillants et huit soldats, outre quatre qu’on devait prendre à Montréal », note le Journal des jésuites. La plupart de ces personnes périrent, sans doute, lors des massacres qui eurent lieu, quelques mois plus tard, dans la région des lacs. Ce convoi de 1648 devait être, pour six ans, le dernier qui se rendrait aux missions de l’ouest.

Le départ de M. de Montmagny du Canada marquait la fin d’un régime qui avait prévalu depuis 1636 ; mais les nouveaux arrangements ne valaient pas mieux que les anciens, et la colonie continua à s’enfoncer dans la triste situation qu’on lui imposait.

« Le nouvel état de 1648, dit M. Gérin constituait sur l’ancien une épargne de 19.000 francs, qui était laissée à la disposition du Conseil. D’Ailleboust s’empressa d’appliquer cette épargne à la formation d’une compagnie de soldats qui devaient se transporter sans cesse d’un point à un autre de la colonie, à la poursuite des Iroquois. Il donna à son neveu, Charles d’Ailleboust des Musseaux, le commandement de ce camp volant. Il est évident que cette mesure profitait surtout à Montréal qui était de tous les postes le plus exposé. »[1]

Monsieur de Montmagny avait projeté de former un camp volant dont les soldats, espèce de milice volontaire, tiendraient la campagne et poursuivraient l’ennemi lorsqu’il se montrerait dans le voisinage des habitations.[2] Les ressources pécuniaires lui ayant fait défaut, son successeur s’en occupa et y réussit.

  1. Léon Gérin, dans la Science sociale, Paris, 1891, p. 564.
  2. Relation, 1(48, p. 4.)