Page:Benoit L Atlantide.djvu/195

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Sur la table, des gobelets de terre rouge. Une lourde jarre, pleine d’alcool de palme.

Parmi les assistants, je retrouvai des connaissances : mon masseur, la manucure, le barbier, deux ou trois Touareg blancs qui avaient abaissé leur voile et fumaient gravement leurs longues pipes à couvercle de cuivre. Tous étaient en attendant mieux, plongés dans les délices d’une partie de cartes qui me parut bien être le rams. Deux des belles suivantes d’Antinéa, Aguida et Sydya, étaient au nombre des convives. Leur lisse peau bistre luisait sous les voiles lamés d’argent. J’eus de la peine de ne point apercevoir la tunique de soie rouge de la petite Tanit-Zerga. De nouveau, je pensai à Morhange, mais seulement l’espace d’une seconde.

— Les jetons, Koukou, — commanda l’hetman. — Nous ne sommes pas ici pour nous amuser.

Le cuisinier zwingliste déposa devant lui une caisse de jetons multicolores. Le comte Bielowsky se mit en devoir de les compter, les répartissant en petits tas avec une gravité infinie.

— Les blancs valent un louis, — m’expliqua-t-il. — Les rouges cent francs. Les jaunes cinq cents. Les verts mille. Ah ! c’est qu’on joue ici un jeu d’enfer, vous savez. Au reste, vous allez voir.

— Je prends la banque à dix mille, — dit le cuisinier zwingliste.

— Douze mille, — dit l’hetman.

— Treize, — dit Sydya, qui, avec un sourire mouillé, assise sur un des genoux du comte, dis-