Page:Benoit L Atlantide.djvu/266

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tilés, proues de vaisseaux, croupes de monstres, ossatures de titans, cette masse formidable par ses reliefs et ses creux, simulait tout ce qu’il y a d’énorme et de tragique. Si limpides étaient les lointains…

— Une pure honte, — disait toujours M. Le Mesge exaspéré, frappant du poing la table.

« …Si limpides étaient les lointains que je distinguais chaque contour comme si j’avais eu sous les yeux, infiniment agrandi, le rocher que Violante m’avait fait voir par la fenêtre avec un geste créateur… »

Je fermai la revue en frissonnant. À mes pieds, maintenant rouge, j’avais, énorme, abrupt, dominant le jardin mordoré, le rocher blanc qu’Antinéa m’avait désigné le jour de notre première entrevue.

— Il est tout mon horizon, — avait-elle dit.

À présent les transports de M. Le Mesge ne connaissaient plus de bornes.

— C’est plus qu’une honte, c’est une infamie.

J’aurais voulu l’étrangler pour le faire taire. Il m’avait saisi le bras et me prenait à témoin.

— Vous lirez cela, monsieur, et, sans être particulièrement compétent, vous verrez que cet article sur l’Afrique romaine est un prodige d’inconscience, un monument d’ignorance. Et c’est signé, savez-vous de qui c’est signé ?

— Laissez-moi, — lui dis-je brutalement.

— Eh bien, c’est signé Gaston Boissier. Parfaitement, monsieur ! Gaston Boissier, grand-officier de la Légion d’honneur, maître de conférences à l’École normale supérieure, secrétaire perpétuel