Page:Benson - La nouvelle aurore, 1915.djvu/254

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turelle me paraisse plus juste. Ce n’est, en somme qu’une question de mots. Cette force, l’Église l’a toujours possédée. Autrefois, elle lui a dû de pouvoir souffrir ; maintenant, elle lui doit le moyen de régner. Mais j’ai l’idée que, en y réfléchissant, vous n’auriez pas de peine à découvrir que cette même force continue à armer l’Église jusque dans la souffrance.

— Oui, mon père, s’écria tristement le prêtre, oui, en effet, je commence à m’apercevoir de cela ! Vous-même, le prince Otteone…

Le vieux cardinal hocha la tête.

— De moi-même, n’en parlons pas ! Je suis un très vieil homme, et je ne m’attends nullement à souffrir. Pour le prince Otteone, c’était différent. Le prince Otteone était un jeune homme plein de vie ; et, dès le début, il a su parfaitement vers quel sort il allait. Eh ! bien, est-ce que son aventure ne vous frappe pas ? Il est parti gaiement, sans l’ombre d’un regret. Vous a-t-on dit cela ?

Ce fut au tour du prêtre de rester silencieux.

— À quoi pensez-vous, mon enfant ? Mais monsignor hésitait à répondre.

— Allons, mon fils, ne craignez pas de parler ! reprit le cardinal.

— Je pense à Sa Sainteté ! éclata soudain monsignor. Je l’ai trouvée si indifférente, si froide, avec si peu de souci pour la vie ou la mort de ses messagers !…

Il releva sur le vieux cardinal un regard angoissé.