Page:Bentzon - Le Roman d’un muet, 1868.djvu/66

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présentée à un tuteur inconnu, dont elle ignorait les dispositions favorables ou hostiles. Comment les plus mauvais n’auraient-ils pas été bons pour elle ? Son regard franc savait si bien supplier, caresser, remercier l’amitié qui venait à elle irrésistiblement séduite. Je n’ai jamais connu d’attrait pareil à celui de ce grand œil gris coupé en amande, qu’assombrissait l’émotion et que la gaieté baignait d’azur. J’eusse défié celui qu’il interrogeait de pouvoir mentir, et quand il s’arrêtait sur vous, une incroyable sérénité descendait dans l’âme la moins paisible. C’était, avec sa chevelure luisante d’un noir bleu, la seule beauté de cette Anglaise dont le soleil asiatique avait de bonne heure ambré le teint, décoloré les lèvres et arrêté le développement physique. Tout en elle était gracieux pourtant, d’une grâce à la