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Page:Bera - Attendre-esperer - Les Desirs de Marinette.djvu/22

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présenter un enfant, qu’il prit dans ses bras et qu’il examina soigneusement, en appliquant l’oreille sur sa poitrine ; après quoi, s’approchant d’un de ces bancs qui, à la campagne, bordent presque toutes les maisons, il griffonna sur ses genoux un billet, le remit à la mère et poursuivit son chemin.

« Où va donc aujourd’hui le docteur Émile Keraudet ? cria de sa fenêtre, au capitaine Montchablond, Mlle Chaussat, qui, assise comme à l’ordinaire derrière ses volets entre-bâillés, maniait son crochet avec une dextérité sans égale et une science d’habitude qui laissait à ses yeux et à sa langue la plus entière liberté.

— Je suppose qu’il va voir ses malades, mademoiselle Chaussat. À moins qu’il n’ait d’autres rendez-vous, » répondit le capitaine, qui, de son côté, fumait sa pipe derrière des volets semblables, dont l’ouverture, braquée sur la fenêtre de Mlle Chaussat, établissait entre les deux voisins comme un courant électrique.

Si ce n’était un hasard heureux, ce devait être la Providence qui avait ainsi placé en face l’une ce l’autre ces deux habitations. Mlle Chaussat est une fille de soixante ans, qui à le nez long, d’anciens beaux yeux, le visage encore vif, une grande facilité d’élocution, des principes sévères et, c’est elle qui l’affirme, une dévotion éclairée. Sa grande occupation est de tricoter au crochet des couvertures de lit