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CHANT IV.
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Je m’armai tristement d’un fusil inhumain
Qui jamais, grâce au ciel, n’a fait feu dans ma main.
Je me chargeai d’un sac, humble dépositaire
De tout ce qui devait me rester sur la terre.
Ainsi, nouveau Bias, je partis accablé
Du poids de tout mon bien sur mon dos rassemblé
Adieu, joyeux dîners, soupers plus gais encore,
Doux propos et bons mots que le vin fait éclore ;
Adieu, friands apprêts, gibier, pâtés dorés,
Au foyer domestique avec soin préparés !
Je suivis à pas lents des routes parsemées
D’innombrables soldats entraînés aux armées.
Que de tristes festins nous attendaient le soir !
Le pain du fournisseur était-il assez noir !
Son bouillon assez clair, et son vin assez rude !
Par-tout, à notre aspect, la sombre inquiétude
Veillait autour de nous ; nos hôtes consternés
Fermaient leur basse-cour, espoir de leurs dînés.