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Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/122

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— Les véniels ne sont pas de ton ressort. Ils ne font encourir que le purgatoire, qui est hors de tes États. Les péchés mortels seulement. Leur nombre ?

— Douze mille trois cent vingt-huit, ricana le Démon, en se caressant les cornes comme on s’effile les moustaches.

— C’est beaucoup, en effet, fit le juge.

— Pas pour moi, fit le Diable.

Mais le prieur avait pris la parole. Il dit :

— Il y a eu sur la terre un poète qui non seulement a parlé, mais qui a enseigné aux hommes la langue surnaturelle, divine, paradisiaque, que l’on parle entre anges et saints, et qui, Père de la nature, est la tienne.

— Oui, c’est mon cher Virgile, confirma le Créateur.

— Combien a-t-il laissé de vers pour éterniser cette langue de miel ?

— Je l’ignore. Les as-tu comptés, l’abbé ?

— Douze mille trois cent vingt-neuf, soit un de plus que les péchés mortels de mon pauvre Orderic, ici présent, qui les a tous babuinés, sous mes yeux, en un manuscrit extraordinaire et digne de Mme Isabeau de Bav….

La sainte Vierge l’interrompit d’un geste, car il allait s’embourber.