Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/137

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

leur joie exubérante subitement accablée et il participait à leurs batailles d’art retentissantes. Entre ceux qui nous étaient le plus fidèles, le samedi, mon jour, les préférés d’Adolphe étaient M. de Musset, M. Monpou et l’auteur de mon sonnet, M. Félix Arvers. Je me rappelle qu’ils arrivaient toujours ensemble. C’était un trio d’inséparables.

« De M. de Musset, je n’ai rien à vous apprendre. S’il a commencé comme lord Byron, il n’a pas fini aussi bellement que son modèle ; c’est dommage, car nul n’était plus gentilhomme, de race française et doué du charme, du génie. Comme il en tenait pour toutes les femmes, — mon mari l’avait appelé l’amoureux perpétuel, — il était le moins dangereux de mes agresseurs. Quand il me regardait trop obstinément, d’un œil un peu troublé, je le priais de nous chanter certaine chansonnette intitulée : Mon Bédit François, parodie du patois d’Alsace, où il était impayable, — et ça passait.

« La mode, d’ailleurs, nous avait, tous et toutes, affolés de romances, et notre salon, le samedi, tournait au temple de l’art de Garat. Chacun y apportait la sienne, qui de Masini ou de Loïsa Puget, qui d’Étienne Arnaud, de Labarre ou de Paul Henrion et, comme je dis-